Elles sont biens noires, les pensées des nuits blanches [ft Epopées des Etoiles]

Tout était sombre autour de lui. L'air semblait manquer dans ses poumons et un étau enserrait peu à peu son corps et son esprit. Il ne comprenait pas, toute ses pensées semblait être au ralenti. Il ne savait pas où il était, qui il était ni même ce qu'il était. L'obscurité régnait en maître  absolu dans cet endroit et il n'était rien de plus qu'une partie d'elle. Il n'était rien et pourtant il était tout. l'étau dans son esprit se resserra sensiblement avant de se détendre considérablement.

Peu à peu, son esprit sembla prendre place dans un corps. Un frisson remonta sur ce qu'il semblait devenir ses pattes, un intense envie de courir lui pris le cœur et les muscles. Son tout trouva un vaisseau, un contenant. Un pression délicieuse se répandit, retraçant le contour de son désormais corps.

Sous l'intense instinct qui lui dictait de courir il s'élança, poussant sur ses muscles. Une sensation d'étranglement le retint sur place, pas moyen d'aller plus loin. Au fond de lui, un sentiment vicieux s'insinue en lui. Ses oreilles frémirent d'envie et de colère mélangé. son inconscient savait pertinemment pourquoi il ressentait ses sentiment mais son esprit conscient été absolument horrifié de la violence de ses sentiment qu'il ne pouvait accepter comme les sien.

La lumière se fit, les feuilles rouges et jaunes s'étendaient devant lui. La sensation familière mais humide du sol marécageux aurait presque pu le faire sourire si la sensation d'excitation ne s'était pas renforcer dans son esprit. Il regarda autour de lui, sans comprendre d'où ce sentiment venait. Une terrible odeur de mort lui montait au nez. Son esprit frissonna de terreur, son corps de joie.

Ses yeux se posèrent alors sur une vision terrible. Il y avait tant de sang. Des chats, plus d'une dizaine de chats, étendus à même le sol. Noyés dans une mare de leur propre sang. Et des morsures, d'horribles morsures. Une odeur de chien flottait dans l'air et des sons forts, comme des cris s'élevaient parfois. Il voulut détourner les yeux de ce spectacle mais il tomba sur le corps sans vie de son père, horriblement mutilé.

Mue d'une horreur sans pareil, il se souvint alors, il n'était pas dans l'Ombre, il était Nuage du Temps. Un cri bestial sorti des tréfonds de son âme, emportant sa vision et ces sensations loin de lui. Il se senti tomber, violemment. Le choc du sol sous ses pattes lui fit ouvrir les yeux violemment.

Sa respiration agitée et les battements rapides de son cœurs obstruaient tous ses autres sens. Il regarda tout autour de lui, paniqué, il reconnu alors l'âme encore peu familière de la tanière des apprentis. Il se retourna afin de pouvoir s'assurer que son père était bien là. Cela ne faisait que deux petit jours qu'il avait emménagé ici alors, Ode du Vent avait accepté de rester avec lui le temps qu'il s'adapte.

En voyant le mouvement régulier de la poitrine de son père, il se rassura. Tout cela n'était qu'un mauvais rêve. Un simple cauchemar. Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait été transporté dans ce rêve mais cela lui importait peu pour le moment. Il orienta son regard vers l'entrée de la tanière. La nuit était noire, la lune peinait à éclairer l'entrée.
D'un mouvement silencieux, il se leva et déplia ses membres engourdis. Il n'avait pas le cœur de rester ici, il savait qu'il ne s'endormirait de nouveau pas de sitôt. Il évita délicatement le corps de ses camarades endormit. Même si lui ne pouvais pas dormir ce n'était pas une raison pour réveiller les autres. Il ne voulait pas déranger.

Une fois sa tête sortie de la tanière, ses moustaches frémirent en sentant la température extérieure. L'air se refroidissait de plus en plus ses derniers jours, la saison froide arrivait à grand pas. Il allait devoir être de plus en plus prudent, il risquait de tomber malade de plus en plus souvent.

Il respira un grand coup l’air frais et prit son envol. En petites foulées, il atteint le centre du camps sans avoir éveillé qui que ce soit. Il avisa l’antre de son mentor dans la pénombre. Cependant il ne s’attarda pas, le camps semblait trop petit pour qu’il puisse oublier les visions terrifiantes qui passait encore à intervalles réguliers devant ses yeux. Il se reprit en secouant la tête, ses pensées obstruaient encore la réalité et il allait finir par se prendre les pattes dans quelques chose.

Ses pas le menèrent devant l'étang. Son immensité calme reflétait toutes les étoiles du ciel nocturne. Brillante de splendeur. Cet étang représentait la vie du clan. Sa pérennité, ses baptêmes, sa nourriture, ses rites de passage. Cet étang avait vu plus de vies et entendu plus de noms que Nuage du Temps n’en entendrait jamais. Son regard se fit trouble et il oublia le monde autour de lui, perdu dans sa contemplation. Il regardait l’eau et son esprit se rempli de souvenirs. Il voyait le reflet de sa soeur dans l’eau et l'éclat de son rire résonnait à ses oreilles .

Il se sentait un peu seul parfois, mais il se savait chanceux de pouvoir toujours parler à sa soeur. Leur lien si spécial avait même perduré après son ascension parmi les ancêtres. Son esprit continua de divaguer, de plus en plus loin. Suivant l’onde de l’Etang des étoiles.  

L'air était humide, les odeurs étaient estompées, parfois disparues. La terre meuble, presque boueuse, tachait ses pattes qui s'enfonçaient légèrement sous son poids. Le manque de stimulations de ses sens ne fit que permettre à Nuage du Temps de se perdre dans son esprit.

Il pensait à sa sœur et à son sourire quand l'image de sa mère s'imposa dans son esprit. Un soupir s'échappa d'entre ses babines. Ses oreilles se baissèrent et un air mélancolique pris place dans ses yeux hétérochromes. Il repensait à la façon dont sa mère l'avait traité après son baptême, quelques jours plus tôt. Il ne comprenait pas ce qu'il avait fait de mal pour qu'elle le rejette comme cela et surtout il ne savait plus quoi faire pour la rendre fière.

Toute son existence s'orientait selon la volonté des Aurores Boréales. Il aurait le privilège de tenir, un jour, un grand rôle pour le clan. Son père était si fier de lui, il le voyait à chaque fois que ses yeux se posaient sur lui. Il le sentait quand il lui parlait, quand il prononçait son nouveau nom. Mais Mer de Feuilles, elle,  restait de marbre. Elle ne le regardait pas, elle ne le voulait plus et même s'il faisait tout pour ne pas le montrer, ce rejet le blessait profondément.

Nuage du Temps était foncièrement bon, il ne voulait pas inquiéter son père ou son mentor alors il serrait les crocs et il ne disait rien. Mais Nuage du Temps n'était qu'un chaton. Un chaton malheureux. Alors parfois, quand il était seul, ses yeux se remplissait de larmes retenues, les seules témoins de sa solitude.

Une brise douce et fraiche lui caressa le pelage. Un frisson de froid lui hérissa les poils. Ses yeux se firent soudainement plus brillants. Il soupira doucement, luttant pour contenir ses larmes. Il ne devait pas pleurer, il devait être fort, pour son père, pour son clan.

Le manque de bruits et d'odeurs ne fit que perdre de nouveau le jeune apprenti dans les profondeurs de ses pensées, de plus en plus sombres. Dans son esprit tournait le visage de sa mère, amer, de son père, triste, de sa soeur, silencieuse. Un cri, un appel, le fit reprendre pied avec la realité plus violement qu'il ne l'aurait voulu. Il avait entendu son nom, il en était certain.

Il tourna la tete vers la source du bruit, les yeux encore luisant. Une silhouette se découpait peu à peu dans l'obscurité encore présente. Cette silhouette n'était autre que celle de son lieutenant, Épopées des Étoiles. les sons qu'il entendit finirent par se transposer en mot dans son esprit

- Nuage du Temps, tu es bien matinal ! Que fais-tu par ici ?

Ses oreilles se redressèrent, il ne pouvais pas montrer qu'il était faible ou triste. Il hésita, ne sachant pas vraiment quoi dire. D'un coté, il ne voulait pas mentir et d'un autre il ne voulait pas raconter ce que ses rêves lui montraient. Il n'avait toujours rien dit à Sève d'Ajoncs à propos de sa sœur, encore moins de ses cauchemars. Toute la beauté de la relation qu'il avait semblait se tenir dans le secret qu'il cachait. Il se cachait aussi derrière cette excuse car parler de sa sœur avec qui que se sois soulèverai plus de questions et plus de douleurs, puis son père serai-  Il sursauta imperceptiblement quand il se rendit compte que ses pensées l'avaient encore emporté loin de la réalité et qu'il n'avait toujours pas répondu. La réponse était pourtant simple, il n'avait qu'à rester évasif, avec un peu de chance, le grand chat ne chercherait pas à en savoir plus.


- Épopées des Étoiles, bon matin. Simplement des rêves qui me tiennent éveillés, je suis venu chercher un peu de calme et d'espace ici.

Il concentra de nouveau son regard vers l'onde calme. L'Etang avait vraiment quelque chose de mystique et de merveilleux. Il était heureux d'avoir le privilège de contempler ce spectacle pour le reste de ses jours.

- Tout est si calme et beau ici.

Mais il ne pouvait pas rester en silence, ici, pour toujours. Alors, il détacha ses yeux de la surface d'eau clair et orienta son regard encore un peu brumeux vers Epopées des Etoiles. S'il y pensait cinq secondes, c'était assez inhabituel de voir quiconque lever à cette heure-ci. Il ne devrait pas mais, il était assez curieux de connaitre les raisons qui aurai pu pousser le lieutenant à fuir sa tanière de si bonne heure. Et un chaton curieux, même s'il était aussi calme et étrange que Nuage du Temps, ne gardait jamais sa langue dans sa poche longtemps.

- Quelque chose t'a tiré de ton sommeil aussi Épopée des Étoiles?

La question avait glissée hors de ses lèvres sans qu'il ne puisse la retenir. Il aurait pu juste se contenter du calme du moment, mais sa curiosité avait dépassé sa retenue. Il ne pouvait pas retourner en arrière de toute façon alors autant voir où cette conversation le mènerait. L'aube était encore jeune après tout.

Nuage du temps était bien. Le silence entrecoupé par la voix calme d'Epopées des Etoiles l'avait enfermé dans une bulle clame, presque meditative. Il savait poutant que sa curiosité avait été mal placée mais il n'arrivait même pas à s'en vouloir, il se sentait un peu loin de la réalité.

Il avait regardé la silhouette gracile de son lieutenant s'avancer vers l'eau, brisant, l'espace d'une seconde, l'onde calme du lac. Il lui semblait presque voir les rouages tourner dans l'esprit d'Epopées des Etoiles. Il n'était qu'un chaton et il savait que pour le moment, il ne comprenait pas tout. Il n'était pas bête, il se doutait bien que sa demande ne rencontrerai que le silence. Un adulte ne se confit pas a un chaton, encore moins un lieutenant. Mais, il ne se sentait pas déçu pour autant. Il n'attendait rien, il donnait son oreille tout simplement.

Il ne vit pas les griffes de l'adulte plantées dans le sol. Mais il remarqua son air tourmenté et pensif. Il le laissa dans ses pensées, s'approchant en silence du grand matou jusqu'à presque coller sa fourrure à la sienne. Il appréciait la chaleur qu'il dégageais et être près d'un adulte avais toujours se petit quelque chose de rassurant.

-Mon rêve a ravivé un souvenir douloureux en moi, mais ça va mieux, enfin... je crois, je ne sais pas vraiment.

Nuage du temps comprit alors qu'il n'aurai pas plus de details. Ca lui allait. Il n'en demandait déjà pas tant. Il était témoin du tourment d'un chat et en tant que futur guérisseur il se faisait un devoir d'aider au mieux tout ce qu'il croisait. Il prit un instant pour peser ses mots, il ne voulait pas paraitre immature à Epopées des Etoiles.
Il leva le regard vers l'aube naissante et miaula doucement, d'un ton calme, presque prophétique.

- Les rêves sont des instruments précieux. Mises en garde, annonciateurs de bonheur, de malheur, d'espoir ou de changements. Les Aurores Boréales t'envoient peut-être le signe qu'il est temps de faire le deuil de ton souvenir ? De te pardonner peut-être?

Il referma sa gueule. Il ne voulait pas en dire plus, cela aurai été pousser trop loin. Il n'était qu'un chaton, et un chaton de prophétise pas. Il fallait dire qu'à cause des rêves avec sa sœur il lui semblait avoir vécu quelques lunes de plus. Il était déjà familier avec les énigmes et les messages cachés qui était propre aux anciens. Parfois il parlait comme cela et bien sur, il ne s'en rendait compte qu'une fois que les mots lui avaient glissés hors du cœur.

"T'es vraiment trop bizarre toi !"  "Petit Temps tais-toi, ça n'interesse personne !"

Dans sa tête résonnait les paroles blessantes des chats du clan. Des Chatons de son âge. De sa Mère. Les murmures désapprobateurs tournaient dans son esprit lui donnant presque le tournis. Ses oreilles se baissèrent doucement. Il ne voulait pas être un Apprenti étrange ou impertinent. Il se sentait juste très déconnecté de la réalité ses derniers temps et son cauchemar ne faisait rien pour arranger son état, bien au contraire.

- Je suis désolé. Je n'aurai pas du dire ça. C'était déplacé. Je ne suis pas très....

Il détourna le regard. Tentant de se soustraire à un possible regard noir, déçu ou réprobateur qu'allait surement lui lancer son lieutenant. Ne pouvait-il pas juste être normal pour changer ?